Newsletter

Vie des affaires

Dirigeants sociaux

Une SARL doit exécuter l’engagement financier pris par un de ses salariés agissant pour son compte

La société est tenue d'honorer l'engagement financier pris pour elle par un salarié, dès lors que tout indiquait au cocontractant que ce salarié agissait comme le mandataire de la société. Cette situation, appelée « mandat apparent », est illustrée par un récent arrêt de la chambre commerciale de la Cour de cassation.

Un salarié souscrit un engagement financier au nom de sa société

Une SARL intervient en tant qu’apporteur d’affaires aux côtés d’une société réalisant l’acquisition de parcelles à construire.

Dans le cadre de cette opération, la société acquéreuse est amenée à verser une indemnité transactionnelle de 60 000 euros à un riverain des parcelles cédées.

Pour le paiement de cette indemnité, l’acquéreuse sollicite la contribution de la SARL apporteuse d’affaires. Un salarié de celle-ci accepte et confirme, par courriel, qu’elle supportera la moitié de l’indemnité transactionnelle, en renonçant à une partie de ses honoraires d'apporteur d'affaires.

La société est tenue d’exécuter cet engagement financier

La SARL assignée en paiement

Pour contraindre la SARL à verser sa part de l’indemnité transactionnelle, soit 30 000 euros, la société acquéreuse l’assigne en paiement.

L’acquéreuse fait valoir les courriels échangés avec un salarié de la SARL dans lesquels il déclarait intervenir pour le compte de cette société et confirmait l'engagement de paiement de celle-ci.

L’acquéreuse obtient gain de cause en appel, la SARL est alors condamnée au paiement de la somme de 30 000 euros avec intérêts.

Le salarié reconnu "mandataire apparent" de la SARL

La SARL se pourvoit en cassation. Afin d'invalider son engagement financier à l'égard de l'acquéreuse, elle lui reproche de n’avoir pas vérifié les pouvoirs de son salarié ou l'identité du gérant.

Les arguments de la SARL sont rejetés par la Cour de cassation. Vis-à-vis de l'acquéreuse, le salarié s'était en pratique comporté comme le mandataire apparent de la SARL, ce qui la dispensait de vérifier ses pouvoirs.

Précautions à prendre lors de la conclusion d'un contrat

Dans cette affaire, le cocontractant a eu la chance d'obtenir gain de cause grâce à la reconnaissance d’un mandat apparent. Cela n'est toutefois pas systématique car dépend largement des circonstances (voir par exemple, cass. com 6 octobre 2015, n°14-13812).

Aussi, pour plus de précaution, il peut être utile en pratique, lors de la conclusion d’un contrat, de procéder à certaines vérifications :

- tout d’abord, vérifier l’identité du dirigeant de la société avec laquelle le contrat va être conclu ;

- si le négociateur ou signataire du contrat n’est pas le dirigeant, il peut toutefois agir en vertu d’une délégation de pouvoirs : il convient alors de vérifier si elle l’autorise à mener la négociation ou à signer le contrat ;

- enfin, en cas de doute, il est toujours possible d’interroger la société cocontractante afin de se faire confirmer, par écrit, les pouvoirs détenus par son interlocuteur (c. civ. art. 1158).

Pour aller plus loin :

"Le mémento de la SARL et de l'EURL", RF Web 2020-3, § 360 et 364

Cass. com, 9 mars 2022, n°19-25704